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Équipe MATISEN: Matériaux pour les technologies de l’information, les capteurs et la conversion d’énergie.

LE NORMAND François

De Équipe MATISEN: Matériaux pour les technologies de l’information, les capteurs et la conversion d’énergie.
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Parcours de recherche

Dans une première partie notre parcours scientifique est retracé en 10 pages en précisant le contexte et les principaux résultats obtenus. Ensuite une analyse plus détaillée des résultats est proposée (environ 35 pages). Enfin nous terminons par les perspectives de recherche. Références (cf titres et travaux) P : article ; AC : actes de congrès ; T : thèse; Co : Collaborations contractuelles.

Introduction

Nos recherches commencées en 1978 ont constamment évolué depuis l'étude des mécanismes de réactions catalytiques d'hydrocarbures saturés jusqu'à la nucléation-croissance de matériaux carbonés par dépôt d'une phase vapeur carbonée activée, en passant par l’étude des matériaux catalytiques et par la nucléation-croissance du diamant CVD. Nonobstant la diversité des moyens d’élaboration et des thèmes abordés, il existe donc un fil conducteur dans ces évolutions thématiques que l’on peut lier à la réactivité du carbone et à l’élaboration de matériaux carbonés (diamant, Diamond Like Carbon, nitrures de carbone, agrégats (oignons, tripodes), nanotubes, graphène plus récemment). Les points communs suivant peuvent être soulignés : 1) La dynamique des transformations à une interface gaz-solide, soit sur un site catalytique, soit dans un processus de nucléation-croissance, est toujours restée au coeur de nos travaux. L'étude des mécanismes des transformations à l'interface gaz-solide, via le site catalytique ou le site de nucléation, a conduit à la mise en oeuvre de dispositifs expérimentaux (réacteurs catalytiques, chambre de nucléation-croissance) couplés à des techniques d'analyse (XPS, EXAFS, XAS, mesures électriques, mesures plasma) visant à suivre ces dynamiques d'évolution dans les conditions les plus proches de la transformation. 2) La transformation des composés du carbone et de l'hydrogène ou la formation de phase carbonées a toujours été en jeu, seule la nature de leur activation (catalytique, thermique, plasma, ions) et la nature des applications à long terme visées par ces travaux ont pu être différentes (catalyse de raffinage, dépollution automobile, enfin matériau pour l'électronique et le magnétisme). Soulignons par ailleurs que toutes ces recherches ont mis en évidence combien l’étonnante labilité dans l’hybridation des liaisons du carbone conduit à des matériaux et des molécules fascinantes et notamment la forme, l'état chimique et structural de ces surfaces peuvent être fortement influencés par l’environnement chimique en cours de croissance.

Déroulement des recherches

  1. Réaction catalytique des hydrocarbures

J’ai préparé à partir de 1977 une thèse d’Ingénieur-Docteur (11/1980) au Laboratoire de Catalyse et de Chimie des Surfaces de Strasbourg alors dirigé par le Prof. F.G. Gault. Le sujet portait sur la réactivité catalytique d’hydrocarbures saturés (hexanes) sur un composé superacide, le pentafluorure d’antimoine inséré dans le graphite. Ce travail a d’abord comporté la synthèse de ce composé d’insertion au premier stade (SbF5C6,5). Puis, en utilisant une technique de marquage isotopique au carbone 13, nous avons pu élucider et classer les mécanismes d'isomérisation de squelette et de dégradation de ces hydrocarbures et préciser la nature des intermédiaires réactionnels de type ions carboniums [P1-P3, AC1, AC2]. A la suite de mon entrée au CNRS (10/1982) dans le même laboratoire, j’ai démarré un nouveau sujet de recherches portant sur la catalyse de composés intermétalliques à base de terres rares et de métaux de transition, en particulier CePd3, où la forte densité d'états au niveau de Fermi permettait d'espérer une forte activité catalytique intrinsèque [P4, P6]. Par la suite, ma contribution propre à l’étude des mécanismes de réactions catalytiques s’est focalisée sur la catalyse d’isomérisation et d’hydrocracking des alcanes sur palladium déposé sur différents supports (Al2O3, oxydes de terre rare, TiO2) ou promoteurs (terres rares). J’ai pu rendre compte des sélectivités catalytiques sur Pd/Al2O3 en m'appuyant sur la chimie très riche des complexes réactionnels du palladium [P14]. J’ai ensuite utilisé ces réactions modèles comme sonde de l’interaction entre le palladium et le promoteur ou le support [P9, P21, P34, P37, P42, T1]. J’ai également participé à l’étude de l’hydrogénation des alcènes insaturés sur intermétalliques [P12, T2] et à la sélectivité dans le gaz de synthèse CO + H2. J’ai en particulier postulé et vérifié une sélectivité renforcée en alcools lourds en utilisant des catalyseurs d’oxydes de terres rares de structure fluorite (Ce, Pr, Tb) [P9-P10].

  1. Nouveaux matériaux catalytiques

J’ai alors évolué vers l’étude physique des matériaux catalytiques et plus particulièrement des métaux de transition déposés sur oxydes de terres rares, systèmes catalytiques importants pour la dépollution automobile en particulier. C'est à cette époque que nous avons démarré des études systématiques de la surface par spectroscopie de photoélectrons (XPS), notamment les fluctuations des états d'oxydation de la terre rare (cérium plus particulièrement) dans des systèmes catalytiques MT/ReOx et MT-ReOx/Al2O3 (MT : métal de transition tel que Pd, Pt, Rh; ReOx : oxyde de terre rare tel que La2O3, CeO2, PrOx, TbOx, Nd2O3, etc...) [P5]. Citons entre autres résultats la réduction du support oxyde de terre rare de structure fluorite (CeO2, Pr6O11 et Tb4O7) activé par le métal de transition et le role du chlore dans l'activité catalytique. Cette réduction de la terre rare, très difficile en l’absence de métal de transition, est réversible, et elle est à la base des interprétations sur le rôle du cérium dans les catalyseurs de dépollution [P7, P16, P17, T3, T4]. Celui-ci joue le rôle d’un volant d’inertie : stockage puis libération d’oxygène dans les phases faiblement oxydantes puis faiblement réductrices du cycle des moteurs. Après ma soutenance de doctorat d'Etat (06/1985), je suis parti une année en stage post-doctoral au Laboratoire d'Utilisation du Rayonnement Synchrotron (LURE) à Orsay pour acquérir les techniques d'EXAFS et d'absorption X (XAS), plus particulièrement sur ce thème. En effet ces méthodes présentent l’avantage de pouvoir étudier la structure de matériaux divisés à l’échelle de nanoparticules et/ou d’amorphes et de pouvoir étudier leur comportement en cours de réaction. J’ai pu ainsi mettre au point un réacteur expérimental dédié au cas spécifique du seuil LIII du cérium. Les fluctuations d'oxydation de la cérine en présence ou non d'un métal de transition dans des conditions réductrices ou oxydantes ont pu ainsi être étudiées in situ au seuil LIII du cérium [T3, T4, AC8, AC9]. Un modèle de réduction de la terre rare a ainsi pu être proposé, rendant compte des propriétés très particulières de celle-ci en présence d'un métal de transition [P18]. Celui-ci dissocie l'hydrogène moléculaire en hydrogène atomique, qui agit alors comme un puissant agent de réduction de la cérine. Une collaboration a été nouée sur ce sujet avec Rhône-Poulenc (1988-1990) et d’autres laboratoires universitaires aux compétences complémentaires [Co2]. Elle a abouti à une publication qui fait référence encore aujourd’hui [P11, citée plus de 350 fois]. Nous avons également pu démarrer au LURE de nouveaux sujets de recherches, poursuivis après mon stage post-doctoral. Nous avons ainsi étudié par EXAFS au seuil LIII du platine in situ la formation de particules de platine ultra-dispersées sur Al2O3 (taille < 1 nm) à partir de la réduction d'un complexe hexachloroplatinique ancré sur le support (naissance d’une particule métallique supportée). On a pu décrire les différentes étapes du processus: dépopulation de ligands, diffusion de particules atomiques et coalescence [AC6, AC7]. Ce thème a ensuite été repris dans le cadre d’un PICS Franco-Argentin sur la stabilité des catalyseurs hétérogènes, nanoparticules de platine dispersées sur un support [Co4]. Nous avons abordé l’étude du frittage et de la redispersion à haute température sous différentes atmosphères réactionnelles corrosives (HCl, H2O et O2). Un complexe hydroxochloroplatinate a pu être postulé à partir de ces expériences, ainsi que l’existence de deux phases dispersées (2D et agrégat) dont les proportions sont fonction de la concentration relative de surface d’ions chlore et hydroxyles, et induisent de ce fait soit le frittage, soit la redispersion de la particule catalytique [P23, P39].

  1. Nucléation-croissance CVD du diamant

En 1991, j'ai rejoint le Groupe Surfaces et Interfaces (GSI) de l'Institut de Physique et Chimie des Matériaux de Strasbourg (IPCMS) récemment créé afin d'y développer une nouvelle thématique concernant la nucléation-croissance de films diamant par dépôt chimique de vapeur activée par filaments chauds (HF CVD). Parmi les nombreuses applications potentielles du diamant, la mise au point de dispositifs électroniques de haute puissance capables de travailler dans des atmosphères radiatives, corrosives ou thermiques sévères était une des plus prometteuses. Postulée depuis bien longtemps, la mise en oeuvre de ces potentialités se heurtait entre autres à un problème de cristallogenèse. On peut le résumer ainsi: Comment obtenir des couches diamant hétéroépitaxiées de grande pureté cristallographique et chimique, et ceci alors - Que la structure diamant est en compétition avec le graphite, autre variété allotropique du carbone, et plus stable dans les conditions de dépôt. - Que les très grandes énergies de surface du diamant privilégient une croissance par ilots de type Volmer-Weber. - Que les hétérosubstrats adéquats stables sont rares, dans les conditions thermiques et corrosives sévères du dépôt et avec la grande densité atomique du diamant. - Que l'adhésion du film au substrat est en général faible, ceci étant du entre autres à la grande inertie chimique du diamant et à la grande différence des coefficients de dilatation thermique. Un préalable à la croissance épitaxique impliquait donc l'élucidation du mécanisme de nucléation compétitive du diamant (vitesse, densité à saturation, sélectivité). Il était convenu à l’époque dans la littérature que seule la présence et la réactivité en surface de l'hydrogène atomique, dissocié par les filaments chauds, contribuait à stabiliser cette phase métastable de diamant par rapport au graphite, sans fournir à cet égard d’explications vraiment convaincantes. Nous avons mis au point un dispositif expérimental unique en France à l’époque dans le cadre du Réseau national "Diamant et Matériaux dérivés" piloté par le PIRMAT/CNRS et la DGA/DRET [Co5, Co6]. Ce dispositif permettait - de préparer, de modifier et de contrôler la surface de départ de l’hétérosubstrat - de réaliser des dépôts de carbone à partir d’un procédé HF CVD dans des conditions contrôlées - de suivre de façon séquentielle le dépôt de carbone par spectrocopie de photoelectrons, spectroscopie des électrons Auger (AES) et spectroscopie de pertes électroniques (ELS), ces deux dernières techniques se révélant très sensibles à la nature du carbone. Ce dispositif, associé à des études microstructurales des substrats et des dépots (MEB, AFM, TEM, microscopie Auger à balayage, spectroscopie Raman) nous a permis de mettre en évidence, de quantifier et de modéliser les étapes de la nucléation-croissance du diamant sur différents substrats. En particulier nous avons conduit les premières études systématiques sur des surfaces monocristallines de silicium [T5, P15, P19, P25-27] et de cuivre [T6, P28, P70, AC18]. D’autres études ont concerné des surfaces polycristallines : silicium [P22, P38], titane et ses alliages [T7], nickel [T8, AC46] et des couches minces orientées telles que siliciures de nickel [T8, P41], substrats mieux adaptés à la croissance hétéroépitaxique du diamant en termes d'accord cristallographique, de coefficients relatifs de dilatation thermique et d'énergies de surface, et iridium [P43]. D’une manière générale, la nucléation du diamant est toujours observée dans les conditions HF CVD mais avec des cinétiques extrêmement variables suivant la nature chimique et cristallographique du substrat, et des prétraitements subis. Elle est due à la fois à la réactivité sélective de l’hydrogène atomique vis-à-vis du carbone et à la nature et à la réactivité du substrat avec le carbone. Rien n’a mieux illustré cette double interaction que les études conduites sur monocristaux de silicium (100) et (111) et de cuivre (111) [P19, P25, P26]. Sur silicium, nous avons observé 1) La formation d’une couche de carbure de silicium d’épaisseur variable suivant l’état de surface du silicium, mais toujours de l’ordre de quelques nm. 2) La gravure sélective du substrat par l'hydrogène radicalaire conduisant à la formation de figures d'attaque de symétrie 3 sur Si(111) ou de symétrie 4 sur Si(100). L’attaque est inhibée par le carbone [P32]. 3) La mise en évidence d'une population d'embryons coexistant avec les germes de diamant. Ceux-ci se localisent au bord des figures d'attaque sur les substrats propres et aléatoirement sur les substrats préalablement traités (mécaniquement ou ultrasoniquement) où la rugosité de surface est grande. Leur nature propre a ensuite pu être précisée par des études de microscopie électronique sur des lames amincies [T10, P44, AC24, AC25] Nous avons alors postulé un mécanisme de nucléation de type Avrami impliquant les étapes successives de transformation de phase du carbone en surface [P38]: i) Création des sites de nucléation soit par traitement préalable ex situ (sites extrinsèques obtenus par prétraitements), soit en cours de déposition, notamment par gravure (sites intrinsèques) ; puis ii) formation d'un embryon carboné au niveau de ces sites de type carbure de silicium ou carbone DLC (diamond-like carbon) suivant les conditions expérimentales HF CVD ; enfin iii) création d'un nucléus stable par transformation de l'embryon sur le site de nucléation. On a pu alors montrer que la croissance des nucléi s'effectue suivant deux processus dont l'importance varie avec le taux de recouvrement S en diamant. En dessous du seuil critique (S * 0.03), la croissance s'effectue par adsorption, diffusion de surface et réactivité à l'interface (alimentation indirecte par le support). Au dessus de ce seuil critique, elle s'effectue par réactivité directe des espèces carbonées et hydrogénées (alimentation directe par le gaz). A l’inverse du silicium, le cuivre ne peut donner de carbure ni ne dissout le carbone. Il se forme alors initialement une fine couche de carbone graphitique (initialement une monocouche de graphène) remarquablement stable dans les conditions du dépôt [P28, AC13], et cela même si l’on introduit préalablement des germes de diamant [P70]. La nucléation du diamant a lieu suivant le mécanisme de Lambrechts, sur les faces prismatiques de ce graphite. La croissance de cette couche de graphite a été suivie sur monocristal et polycristaux de cuivre. Les vitesses de nucléation sont alors très variables. Ce résultat a contredit l’explication classique suivant laquelle le diamant n’est que le fruit de la réactivité compétitive supérieure de l’hydrogène avec le graphite. Il a illustré combien la nucléation est le résultat d’un processus de transformation de phases carbonées en surface. Le cas du nickel est encore plus complexe car il y a alors coexistence à la fois d’une phase graphitique (quelques couches de graphène), de carbure de nickel et de diamant [AC46]. Par la suite, nous avons développé le procédé de nucléation par polarisation [T8, T11, AC26, AC33]. La polarisation négative du substrat par rapport au gaz conduit à une décharge incandescente et à un bombardement de la surface du substrat par les ions carbonés. Cette technique a été reconnue très tôt pour augmenter et orienter les nucléi de diamant. Nous avons mis au point un tel dispositif dans une chambre UHV en le perfectionnant par une double décharge plasma en courant continu : l’une permet de créer un plasma primaire tandis que l’autre permet d’extraire, de focaliser sur le substrat et de contrôler l’intensité du faisceau d’ions. Cela a permis d’augmenter considérablement la vitesse de nucléation. Nous avons également ajouté d’autres techniques d’études : mesures électriques in situ, mesure de l’émission optique dans le visible [P63], analyse angulaire XPS. Nous avons alors pu montrer que la nucléation induite par polarisation négative du substrat était liée à l’implantation superficielle du carbone suivie d’une nucléation dans le volume du diamant et enfin de son émergence à la surface due au processus en continu de gravure chimique et de pulvérisation du substrat de silicium [T11]. Des collaborations ont été initiées dans ce domaine, utilisant notre expertise dans les spectroscopies d’électrons telles que l’XPS, AES, ELS, XAS. Elles nous ont permis d’apporter quelques contributions significatives sur la dégradation des films diamant suivant les conditions expérimentales de croissance [P29], dans la croissance de diamant sur WC-Co [P35, AC19, Co7], dans les détecteurs diamants de l’expérience LHC du CERN [P40, AC15, AC15]. Plus récemment nous avons étudié en partenariat avec l’Institut de Saint Louis (ISL) la formation de poudre de nanodiamants (environ 5nm) produits par onde de chocs [P72] et avec l’Université de Lille l’hydrogénation de surfaces de diamant par HF CVD [P78, P83].

  1. Croissance de nouveaux matériaux carbonées

Les développements expérimentaux liés à la croissance de diamant nous ont permis d’apporter quelques contributions significatives à la formation de nouvelles phases carbonées. Ainsi, lors de la croissance de diamant sur cuivre a mis en évidence la coexistence avec les couches graphitiques de nouvelles nanostructures carbonées : agrégats de carbone graphitique de type sphérique (oignons de carbone) [P36], de type polyhédrique présentant des surfaces négatives, mises en évidence à notre connaissance pour la première fois [P33]. Ces agrégats de carbone chauffés et bombardés par le faisceau intense des électrons d’un TEM se transforment en diamant [P48]. Nous avons également fortement contribué, (col PHASE à Strasbourg), à l’étude des films de Diamond-Like-Carbon (DLC) préparés par ablation laser, plus ou moins dopés à l’azote [P45, AC21-22]. Les analyses XPS et XAS se révèlent extrêmement riches d’information sur la nature des liaisons carbone-carbone et carbone-azote, mais difficiles d’interprétation [P46]. Nous avons contribué à clarifier ces difficultés d’interprétation pour les spectres XPS, mais il nous reste à confirmer par des calculs ces prédictions et à entreprendre la même démarche pour les spectres XAS.

  1. Croissance de films de nanotubes de carbone orientés

Depuis 2001 environ, nous nous sommes réorientés vers la croissance de films de nanotubes de carbone en utilisant les procédés d’élaboration CVD activée par plasma et/ou par filaments chauds utilisés pour la croissance du diamant. Il est fascinant d’ailleurs de constater combien de faibles modifications des paramètres d’élaboration CVD et/ou des paramètres du substrat (nature, forme,…) conduisent à la croissance de matériaux carbonés aux morphologies aussi différentes que les oignons (0D), les nanotubes de carbone (1D), le graphène (2D) ou le diamant (3D). Les nanotubes de carbone constituent un matériau de référence dans les nanotechnologies, par sa facilité (apparente) d’élaboration, son fort rapport d’aspect, ses propriétés électroniques finement variables (de semi-conducteur à métallique), ses propriétés mécaniques, thermiques, chimiques remarquables. Une des méthodes de plus en plus largement utilisé pour faire croitre des nanonotubes est la CVD assistée catalytiquement par des métaux de transition tels que Fe, Co, Ni. Nous avons donc dans un premier temps modifié notre réacteur pour l’étude in situ de la croissance de films de nanotubes de carbone en y adjoignant des cellules d’évaporation de catalyseurs (Fe, Co). Avec des filaments chauds et une décharge plasma nous avons pu obtenir des films alignés de nanotubes multiparois individuels et orientés verticalement par rapport au substrat avec une très grande sélectivité. Ce procédé a été appelé Plama-Enhanced Hot Filaments Catalytic CVD ou PE HF CCVD [T9, T13, P59, AC32]. Ceci nous a permis d’en déduire un modèle, basé sur le mécanisme Vapour Liquid Solid (VLS), dans lequel nous avons distingué une étape de nucléation distincte d’une étape de croissance, en particulier nous avons mis en évidence la formation de « nids » de carbone graphitique à l’interface entre une particule catalytique et le substrat, dont la propagation sur le substrat est empêchée par la réactivité très grande des radicaux. Dès lors, le carbone s’accumule sur les faces métalliques protégées de cette gravure chimique par ségrégation puis condensation, conduisant au soulèvement de la particule si l’interaction catalyseur-substrat via le « nid » est faible (mécanisme de croissance par le sommet) [P59]. Plus récemment, en collaboration avec l’Université de Bratislava (Slovaquie), nous avons étudié l’activation de la phase gaz à la fois d’un point de vue expérimental par mesures d’émission optique dans le visible (OES) et par modélisation du plasma et de l’interaction substrat plasma [T13, P53, P73, AC38-39]. La modélisation nous a conduit à l’identification d’espèces actives de la croissance et à la prédiction de vitesses de croissance suivant les modes d’activation du gaz pouvant varier jusqu’à 5 ordres de grandeur, en bon accord avec les résultats expérimentaux. Nous avons également développé la croissance de films denses de nanotubes « tapis » sur substrat SiO2/Si(100) et TiN/Si(100) [P51], la couche de TiN conductrice étant développée pour s’affranchir de la couche de SiO2 isolante. Nous nous sommes interessés (col Laboratoire de Catalyse, Strasbourg) à l’étude in situ de de la cinétique de croissance par CCVD classique (sans activation), utilisant une thermobalance de haute précision, et à la modélisation de cette croissance par un modèle de différences finies [T12]. Nous avons ainsi pu déterminer les paramètres cinétiques tels que l’énergie d’activation, les ordres de réaction par rapport aux réactifs. Ces données sont cohérentes avec une vitesse de croissance limitée par l’adsorption du précurseur carboné sur la surface du catalyseur. La nucléation du nanotube est quant à elle tres dépendante de l’état physique (solide, quasi liquide) et chimique (carbure) du catalyseur. Nous avons également prédit que la nucléation de nanotubes pourrait être conditionnée par la présence de chaines carbynes sp1 [P58, P79]. Le mode de croissance spécifique PE HF CCVD privilégiant une croissance orientée et les applications pour l’émission de champ et le magnétisme nous ont conduits à l’étude spécifique de l’alignement mutuel des nanotubes de carbone dans ces films. Pour cela nous avons développé deux techniques originales : la diffraction aux petits angles en incidence rasante (GISAXS) et la spectroscopie d’absorption X au seuil du carbone (XAS). L’analyse des images GISAXS réalisée dans les modes Distorted-Wave Born Approximation (DWBA) and Effective Layer Born Approximation (ELBA) a permis de déterminer des paramètres importants tels que la densité de CNTs, les longueurs caractéristiques, la dispersion atomique du Co le long des CNTs, apportant des informations structurales (distribution des diamètres et des longueurs) et sur les corrélations (densité, alignement mutuel et orientation moyenne) [P66, P69]. La spectroscopie d’absorption permet pour sa part de déterminer semi-quantativement le degré d’alignement des couches de carbone formant le nanotube suivant un modèle géométrique développé à partir de nos résultats expérimentaux. Enfin en collaboration avec l’Université de Montpellier et de Nancy, nous avons utilisé les spectroscopies XPS et XAS pour une étude approfondies de la fonctionnalisation des nanotubes [P62, P64, P82]. Ces films de nanotubes orientés nanotubes possèdent une forme géométrique idéale (orientation 1D) et des propriétés électroniques (conductivité électrique, stabilité thermique …) qui étaient très prometteuses pour l’émission de champ [AC27]. Cependant l’obtention de véritables prototypes nécessitaient une croissance localisée. Nous avons pu étudier dans le cadre d’un contrat RMNT piloté par Thalès [Co11] les conditions d’obtention d’un réseau de nanotubes uniques orientés verticalement par approche lithographique top-down [P76]. Ces réseaux se sont avérés pouvoir émettre avec une densité approchant l’ampère au cm2, et ceci en dépit d’une probabilité d’émission par nanotube faible, pour des raisons encore mal expliquées. Une autre application intéressante concerne les propriétés magnétiques de ces films. Ici nous avons utilisé une propriété liée à son mode de croissance top-down. Le nanotube incorpore alors le catalyseur à son sommet. Celui-ci est un matériau fortement ferromagnétique : Fe, Co, Ni et alliages. Avec un axe de facile aimantation perpendiculaire à la surface du film, une absence de contact physique lors de la lecture/écriture (fatigue réduite du dispositif), une grande densité de stockage et une grande résistance à l’environnement, les films hybrides de nanotubes de carbone avec une particule ferromagnétique (MT) encapsulée au sommet des nanotubes de carbone (MT@CNT/SiO2/Si(100) sont de bons candidats à cet égard. Ces nanoparticules métalliques prennent toujours une forme très anisotropique après croissance avec des rapports d’aspect (longueur/diamètre) compris entre 3 et 10 [AC 41, 43, 44, 47, T14]. Nous avons pu montrer par XPS que l’encapsulation dans des matériaux non magnétiques telles que les couches graphitiques des nanotubes garantissent une bonne stabilité thermique et chimique et par dichroisme magnétique (XMCD) que le moment magnétique par atome métallique reste élevé. Les propriétés magnétiques de ces films mesurées par SQUIDD dans différentes orientation du champ montrent une forte anisotropie avec la formation d’un axe de facile aimantation le long du grand axe de la particule ferromagnétique, Un faible couplage dipolaire est mis en évidence par microscopie à force magnétique. Nous avons determiné l’influence des interactions par couplage dipolaire entre ces particules ainsi que l’influence de l’effet de l’anisotropie de forme des particules ferromagnétiques par calculs de type Monte-Carlo [T12]. Il est ainsi démontré qu’au delà d’une densité de 1011 cm-2, le couplage dipolaire entre les particules ne devient plus négligeable. Une collaboration active a été nouée à ce sujet avec l’Université de Minsk (Contrat Européen Mobilité FP7). Il nous a permis notamment de modéliser le comportement magnétique à fort champ de ces réseaux orientés, avec αFe et Fe3C comme particules obtenus par CVD par injection (ferrocène, toluène) dont nous avons optimisé les conditions d’incorporation du métal [P89, AC48, AC49].


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